La Cour suprême russe retire les talibans de la liste des organisations terroristes

La Cour suprême russe retire les talibans de la liste des organisations terroristes

Introduction

Changements géopolitiques, stratégie régionale, diplomatie russe : Moscou rebat les cartes en Asie centrale.
Dans une décision qui fait couler beaucoup d’encre, la Cour suprême de Russie vient de retirer les talibans afghans de sa liste officielle des organisations terroristes. Cette annonce, qui intervient alors que le mouvement contrôle l’Afghanistan depuis 2021, marque un tournant dans la politique étrangère russe, avec des conséquences majeures pour la sécurité régionale et les équilibres internationaux.

Un revirement stratégique calculé

Depuis la prise de Kaboul par les talibans, Moscou a multiplié les contacts diplomatiques avec le nouveau pouvoir afghan, tout en maintenant officiellement leur statut d’organisation terroriste. Le retrait de cette qualification ouvre la voie à une normalisation des relations, à l’ouverture de canaux officiels et à une coopération accrue sur les questions de sécurité et de lutte contre le trafic de drogue.

Les motivations de Moscou

  • Sécurité régionale : La Russie, inquiète de la montée de l’instabilité en Asie centrale, souhaite dialoguer avec les talibans pour contenir les groupes djihadistes plus radicaux, comme l’État islamique au Khorasan.
  • Influence géopolitique : Moscou cherche à renforcer son rôle d’arbitre en Afghanistan, face à la concurrence des États-Unis, de la Chine et de l’Iran.
  • Économie et énergie : L’Afghanistan, carrefour stratégique, intéresse la Russie pour ses ressources minières et sa position sur les nouvelles routes commerciales eurasiatiques.

Réactions internationales

  • Occident : Les États-Unis et l’Union européenne dénoncent une « légitimation dangereuse » d’un régime accusé de graves violations des droits humains, notamment à l’égard des femmes.
  • Pays voisins : L’Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Pakistan saluent une décision pragmatique, qui pourrait faciliter la coopération régionale.
  • Talibans : Le gouvernement de Kaboul se félicite d’une « reconnaissance implicite » et appelle à la levée des sanctions internationales.

 

Conséquences pour la sécurité en Asie centrale

La Russie espère que cette ouverture permettra de stabiliser l’Afghanistan et de limiter l’exportation de l’extrémisme vers ses propres frontières. Mais les risques demeurent :

  • Flux de réfugiés : La situation humanitaire en Afghanistan reste dramatique, avec des millions de déplacés.
  • Trafic de drogue : L’Afghanistan demeure le premier producteur mondial d’opium, alimentant les réseaux criminels jusqu’en Russie et en Europe.
  • Terrorisme : Le retrait du statut terroriste ne garantit pas la fin des activités violentes de certains groupes liés aux talibans.

Analyse : la realpolitik russe à l’épreuve

  • Diplomatie pragmatique : Moscou privilégie la stabilité à court terme, quitte à fermer les yeux sur les violations des droits humains.
  • Risque d’isolement : Cette décision pourrait compliquer les relations de la Russie avec l’Occident, déjà tendues par la guerre en Ukraine.
  • Nouvelles alliances : La Russie se rapproche de l’Afghanistan, mais aussi de la Chine et de l’Iran, dans une logique de bloc anti-occidental.