L’inquiétude grandit dans l’écosystème crypto en France : enlèvements, extorsions et appel à la protection
Une vague d’enlèvements qui secoue la communauté crypto
Depuis le début de l’année 2025, la France fait face à une vague inédite d’enlèvements et de tentatives d’extorsion visant des investisseurs et entrepreneurs du secteur des cryptomonnaies. Plusieurs cas très médiatisés – dont celui de Thibaut Boutrou, investisseur et dirigeant d’une société blockchain, enlevé puis relâché après paiement d’une rançon – ont jeté un froid sur l’écosystème. Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, plus d’une dizaine de plaintes ont été déposées depuis janvier, un chiffre probablement sous-estimé tant la peur de la publicité et la crainte de représailles incitent au silence.
Un climat d’insécurité inédit
Les témoignages recueillis auprès de membres de la communauté crypto française révèlent un climat d’insécurité inédit. Les victimes sont ciblées pour leur exposition médiatique, leur réussite financière ou leur implication dans des levées de fonds importantes. Les méthodes employées sont variées : enlèvements express, séquestrations, menaces physiques ou numériques, tentatives d’extorsion via piratage de portefeuilles ou chantage à la divulgation de données privées.
Si la plupart des affaires sont restées confidentielles, certaines ont défrayé la chronique, poussant le ministre de l’Intérieur à convoquer en urgence les principaux acteurs du secteur pour faire le point sur la situation et annoncer un renforcement des dispositifs de protection.
Les failles de la sécurité personnelle
Contrairement au secteur bancaire traditionnel, l’écosystème crypto repose sur la détention individuelle des actifs numériques, souvent via des portefeuilles physiques (cold wallets) ou des plateformes d’échange. Cette gestion décentralisée, si elle garantit l’autonomie des utilisateurs, expose aussi à des risques accrus : une fois les codes ou clés privées obtenus sous la contrainte, les malfaiteurs peuvent transférer instantanément des fonds, sans possibilité de retour.
Les experts en cybersécurité insistent sur la nécessité de renforcer les bonnes pratiques : anonymisation des portefeuilles, stockage multi-signatures, séparation des fonds, recours à des sociétés spécialisées dans la protection rapprochée pour les profils à risque. Mais la réalité du terrain montre que beaucoup d’investisseurs, parfois jeunes et peu préparés, sous-estiment la menace.
Une communauté sous tension
La peur s’est installée dans la communauté crypto française. Certains entrepreneurs ont choisi de limiter leur exposition médiatique, d’autres ont déménagé à l’étranger ou cessé de participer à des événements publics. Les forums spécialisés regorgent de conseils sur la sécurité physique, la gestion de l’anonymat et la réaction à adopter en cas de menace.

Les associations professionnelles, comme l’ADAN (Association pour le Développement des Actifs Numériques), ont publié des guides de bonnes pratiques et demandé la création d’un dispositif d’alerte spécifique pour les victimes. Mais la défiance envers les institutions reste forte, alimentée par le sentiment que la police et la justice ne disposent pas des moyens ou de la formation nécessaire pour traiter ces nouveaux types de criminalité.
Les réponses des autorités : entre urgence et adaptation
Face à l’ampleur du phénomène, le gouvernement a annoncé plusieurs mesures : renforcement des unités spécialisées dans la cybercriminalité, création d’un groupe d’intervention dédié aux enlèvements liés aux cryptoactifs, campagne de sensibilisation auprès des investisseurs et des plateformes. Le ministre de l’Intérieur a appelé à une « mobilisation générale » pour protéger un secteur jugé stratégique pour l’avenir économique du pays.
La coopération avec les plateformes d’échange et les sociétés de sécurité privée a été renforcée. Des protocoles de signalement rapide et de gel des fonds suspects ont été mis en place, même si leur efficacité dépend encore de la rapidité de la réaction et de la collaboration internationale.
Un enjeu de souveraineté et d’attractivité
La multiplication des affaires d’enlèvements et d’extorsion menace l’attractivité de la France pour les entrepreneurs du Web3. Plusieurs start-up envisagent de déplacer leur siège à l’étranger, notamment à Dubaï ou à Lisbonne, villes perçues comme plus sûres et mieux dotées en dispositifs de protection. Les investisseurs étrangers, eux, s’interrogent sur la capacité du pays à garantir la sécurité des talents et des capitaux.
Pour les autorités, l’enjeu est double : préserver la souveraineté numérique et garantir la compétitivité de la place crypto française, tout en luttant contre les dérives criminelles. La France, qui ambitionne de devenir un leader européen du Web3, ne peut se permettre de voir fuir ses meilleurs éléments.
Vers une nouvelle culture de la sécurité
L’affaire Coinbase, qui a révélé une faille de sécurité majeure au niveau mondial, a servi de catalyseur à la prise de conscience. Les professionnels du secteur appellent à une « culture de la sécurité » : formation, anticipation, mutualisation des ressources et partage d’informations sur les menaces émergentes.
Des initiatives voient le jour : création de cellules de crise, partenariats avec les forces de l’ordre, développement d’outils de traçabilité des fonds volés. Mais la lutte contre la criminalité liée aux cryptoactifs reste un défi permanent, à la croisée du numérique et du monde réel.
Conclusion : protéger l’innovation, préserver la confiance
La vague d’enlèvements et d’extorsion qui secoue la communauté crypto française est un signal d’alarme. Pour préserver la confiance et l’innovation, il faudra conjuguer vigilance individuelle, mobilisation collective et adaptation rapide des institutions. L’avenir de la crypto en France dépendra de la capacité à garantir la sécurité des acteurs et à bâtir un écosystème résilient face aux menaces.
