Politique

« L’État russe postsoviétique repose, pour Oleg Orlov, sur deux piliers, la reconstruction impériale et la militarisation »

« L’État russe postsoviétique repose, pour Oleg Orlov, sur deux piliers, la reconstruction impériale et la militarisation »

Ciblé par des poursuites judiciaires, l’adversaire au régime de Vladimir Poutine a décidé de rester en Russie pour continuer à y dénoncer la guerre et à défendre les droits et libertés, a témoigné, dans une tribune au « Monde », l’historien Nicolas Werth, spécialiste de l’Union soviétique. Oleg Orlov, l’un des fondateurs de l’ONG russe Memorial et coprésident du centre de défense des droits humains de Memorial, a été mis en examen le 29 avril. Depuis le 21 mars, il est poursuivi, en vertu du nouvel article 280.3 du code pénal, adopté en mars 2022, après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, punissant de trois ans de prison « les actions publiques répétées visant à discréditer les formes armées défendant les intérêts de Moscou et de ses citoyens ainsi que la paix et la sécurité internationales ». Ainsi, depuis le début de la guerre en Ukraine, Oleg Orlov s’est, à plusieurs reprises, posté avec une pancarte dénonçant la guerre dans un lieu hautement symbolique, en face de la Douma, dans un geste fort rappelant celui des dissidents soviétiques. Il a également publié un article, « Ils voulaient le fascisme, ils l’ont eu », paru en français sur le site de Mediapart, qu’il a partagé, en russe, sur son compte Facebook. Lauréat en 2009 du prix Sakharov pour la liberté de l’esprit et du prix du groupe Helsinki en 2012 pour « sa contribution historique à la défense des droits humains », Oleg Orlov, chercheur en biologie, a commencé son combat dès le début des années 1980, en produisant seul, à l’aide d’un hectographe bricolé par lui-même, des affiches contre la guerre en Afghanistan, puis contre la loi martiale en Pologne en 1981. En 1988, il faisait partie des membres fondateurs du « groupe d’initiative Memorial », puis, en 1990, du centre des droits humains Memorial. Homme de terrain, d’un grand courage, il a travaillé, à partir de 1991, à la tête du programme « Points chauds » du centre des droits humains dans les zones de conflits armés, qui se multiplient, dans le Haut-Karabakh, au Tadjikistan, en Moldavie, en Géorgie et au Caucase du Nord.