Politique

Gérald Darmanin souhaite faire payer aux prisonniers une partie des «frais d’incarcération»

Gérald Darmanin souhaite faire payer aux prisonniers une partie des «frais d’incarcération»

Introduction

Le débat sur la participation financière des détenus aux frais de leur incarcération refait surface en France. Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, a récemment relancé cette idée lors d’une intervention télévisée. Selon lui, il serait juste que les personnes condamnées et incarcérées contribuent, à la hauteur de leurs moyens, aux coûts générés par leur détention. Cette proposition, qui s’inscrit dans une volonté de responsabilisation et de rationalisation des dépenses publiques, soulève de nombreuses questions juridiques, sociales et éthiques.

Le contexte de la proposition

La France fait face à une surpopulation carcérale chronique. Les coûts liés à la gestion des prisons pèsent lourdement sur le budget de l’État : en 2023, le coût moyen annuel d’un détenu était estimé à plus de 45 000 euros. Face à ce constat, le gouvernement cherche des solutions pour optimiser les dépenses et responsabiliser davantage les personnes incarcérées.

Gérald Darmanin a évoqué la possibilité d’instaurer une participation financière obligatoire pour les détenus. Selon lui, il ne s’agirait pas d’une mesure punitive, mais d’une forme de justice contributive, à l’instar de ce qui existe déjà dans certains pays européens.

Les arguments du ministre

Le ministre met en avant plusieurs arguments :

  • Équité : Les citoyens financent par leurs impôts le système pénitentiaire. Il serait donc juste que les détenus, lorsqu’ils en ont les moyens, participent à ce coût.
  • Responsabilisation : Cette mesure inciterait les détenus à prendre conscience des conséquences de leurs actes et à s’impliquer dans leur réinsertion.
  • Exemples étrangers : L’Allemagne, la Belgique ou encore la Suisse appliquent déjà des dispositifs similaires, avec des résultats jugés positifs en termes de responsabilisation.

 

Réactions et critiques

La proposition a suscité de vives réactions, notamment de la part des associations de défense des droits des détenus et des syndicats pénitentiaires. Plusieurs points de contestation émergent :

  • Injustice sociale : La grande majorité des détenus sont issus de milieux défavorisés, avec peu ou pas de ressources. Leur demander de contribuer financièrement pourrait aggraver leur précarité.
  • Risque pour la réinsertion : Ponctionner les maigres revenus des détenus (travail en prison, aides familiales) pourrait compromettre leur capacité à se réinsérer à leur sortie.
  • Complexité administrative : Mettre en place un système de contribution individualisée nécessiterait une lourde gestion administrative, avec un risque de contentieux.

Le point de vue des experts

Des spécialistes du droit pénal et de la sociologie carcérale rappellent que la mission première de la prison est la réinsertion, pas la sanction financière. Selon eux, la priorité devrait être donnée à l’amélioration des conditions de détention, à l’accès au travail et à la formation, plutôt qu’à la recherche de nouvelles sources de financement.

Exemples internationaux

En Allemagne, les détenus doivent en principe contribuer aux frais de leur détention, mais dans la pratique, peu d’entre eux disposent de revenus suffisants. En Belgique, un système similaire existe, mais il est peu appliqué. Ces exemples montrent que la mesure, si elle est adoptée, ne doit pas se faire au détriment des droits fondamentaux des personnes incarcérées.

L’avis des Français

Un récent sondage indique que 57 % des Français seraient favorables à une participation financière des détenus aux frais de leur incarcération, mais seulement si cette contribution tient compte de leur situation financière réelle.

Conséquences potentielles

Si la mesure était adoptée, elle pourrait générer quelques millions d’euros par an pour l’administration pénitentiaire. Mais ses effets sur la réinsertion, la cohésion sociale et la prévention de la récidive restent incertains.

Conclusion

La proposition de Gérald Darmanin de faire payer aux prisonniers une partie des frais d’incarcération relance le débat sur le sens de la peine et la place de la prison dans la société. Entre nécessité budgétaire, équité et réinsertion, la France devra choisir la voie la plus juste et la plus efficace pour l’ensemble de la société.