Politique

Élections de mi-mandat aux États-Unis : Plus qu’un mois avant un scrutin atypique

Élections de mi-mandat aux États-Unis : Plus qu’un mois avant un scrutin atypique

Encore un mois, le 8 novembre prochain,  pour les élections de mi-mandat aux États-Unis, deux ans après l’arrivée au sommet du pays du démocrate Joe Biden. Les Américains sont invités, entre autres, à changer tous leurs députés et le tiers de leurs sénateurs. Le camp présidentiel surveille présentement le Sénat et la Chambre des représentants, cela pourrait réformer.

Dans chaque État, les candidats républicains et démocrates ont été désignés lors de primaires. Ils ont seulement un mois pour faire la campagne, dans des midterms assez inédites. Habituellement, c'est le temps où les Américains évaluent le travail de leur président à mi-parcours, mais cette fois, juste avant l’été, coup de tonnerre : la Cour suprême à la majorité conservatrice élimine la protection qu'offrait l'État fédéral au droit à l’avortement.

Les démocrates donnés vaincus ont repris des couleurs, avec une décision de la Cour suprême qui leur donne un thème de campagne imprévisible : « Il s’agit, et Joe Biden n'arrête de le rappeler, de défendre dorénavant les droits des femmes », évoque Corentin Sellin, historien spécialiste des États-Unis, « et plus largement des droits sociaux qui paraissent menacés par la forme de révolution conservatrice en cours à la Cour suprême ». Ce qui encourage les démocrates à miser sur « une remobilisation de leurs électorats-socle, notamment les jeunes de 18 à 35 ans et les femmes, issues des minorités, qui sont en plus des électorats qui votent fréquemment très peu aux midterms ».

Cependant, après la mobilisation de cet été, le problème de l’avortement semble être passée au second plan, car pour les Américains le véritable enjeu est ailleurs, détaille Jean-Eric Branaa, maître de conférence à l'Université Paris II et auteur de Géopolitique des États-Unis : « Pour les républicains, il est dans l’économie, dans l’inflation toujours très haute. Même si le prix de l’essence a grandement diminué, ils se rendent compte quand même que les produits dans les magasins sont excessivement coûteux et que ça va se poursuivre, et c’est ça qui les inquiète ». Les républicains font aussi une campagne sur leurs thèmes traditionnels, comme l’immigration, ajoute le spécialiste, qui constate que l’électorat est coupé en deux : « on n’a pas, comme les années précédentes, un véritable thème sur lequel tout le monde se retrouve, aujourd’hui c’est vraiment très partagé». 

Donald Trump ubiquiste.

Une spécificité différente de ces élections de mi-mandat : elles concernent non seulement l’actuel président Joe Biden mais également l’ex-président Donald Trump. Lors des primaires républicains, il a soutenu certains candidats, qui la majorité du temps l'ont emporté. Ces candidats sont généralement rebelles et sans expérience, ce qui, là également, a permis aux démocrates de gagner des points en menant des campagnes beaucoup plus musclées que s’ils avaient eu à faire à des candidats sortants ayant déjà fait montre de leur expérience, et bénéficiant d’un solide réseau.

Donald Trump serait-il un frein pour son camp ? « Est-ce que ces candidats, qui ont parfois de lourdes casseroles, sont éligibles par un électorat évidemment beaucoup plus modéré en novembre lors des élections de mi-mandat ? », des questions que se pose Corentin Sellin, qui montre aussi du doigt aux éventuelles retombées sur le scrutin des excès de Donald Trump et de ses ennuis judiciaires, qui deviennent constants.

Au vu de son implication dans le scrutin, l’ancien Chef d'État sera en pole position pour l’élection de 2024 si les républicains gagnent, note le spécialiste. Mais si leur score est décevant, l’emprise de Donald Trump sur le parti pourrait être remise en cause, « parce que l’argument de ‘on a volé l’élection’ marche moins bien la deuxième fois ».   

Une remontée des démocrates qui reste modérée. Mais si les républicains ont en quelque sorte « aidé » les démocrates à revenir dans la partie, personne ne les voit conserver l’ensemble du Congrès. Pour Jean-Eric Branaa, il va leur être très difficile, voire impossible, de garder la Chambre des représentants : « il ne faut que cinq victoires pour les républicains, qui, il faut le rappeler, s’appuient sur une période de redécoupage de l’ensemble des circonscriptions, et ce sont eux qui ont mené la danse puisqu’ils avaient plus d’élus locaux que les démocrates ».

Toutefois, daprès le Sénat par contre, la situation est différente, et, estime le spécialiste, « au vu de l’incompétence de certains candidats républicains » les démocrates devraient garder le Sénat, ou « en tous cas, au pire du pire’ devraient le garder ». « Au pire du pire », explique le spécialiste, « parce qu’on a vu les blocages que cela entraîne ». 

Rosine MANGA