Lula s’oppose à l’« impérialisme » américain – Les Brics en quête d’indépendance
Le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva a une nouvelle fois marqué la scène internationale par la vigueur de ses propos à l’encontre des États-Unis. Lors d’un sommet des Brics particulièrement attendu, Lula a dénoncé l’attitude « impérialiste » de Washington, réagissant aux menaces de Donald Trump d’imposer de nouvelles surtaxes douanières contre les économies émergentes. Cette sortie, loin d’être isolée, s’inscrit dans une dynamique de plus en plus affirmée des Brics, ce groupe de pays qui entend peser davantage dans l’ordre économique mondial.
Dans son allocution, Lula a souligné que « les Brics ne veulent pas d’un empereur », une formule qui a fait le tour des rédactions internationales et des réseaux sociaux, illustrant la volonté des grandes puissances émergentes de s’affranchir de la tutelle américaine. Le contexte est tendu : Donald Trump, en campagne pour un retour à la Maison-Blanche, multiplie les déclarations offensives contre la Chine, le Brésil, l’Inde et la Russie, menaçant de revoir à la hausse les droits de douane sur une large gamme de produits importés. Pour Lula, cette stratégie protectionniste n’est qu’une tentative de préserver la suprématie économique américaine au détriment du développement des autres nations.
La réaction du Brésil ne s’est pas fait attendre. Le gouvernement a annoncé l’ouverture de consultations avec ses partenaires des Brics pour élaborer une réponse coordonnée. L’objectif : renforcer les échanges intra-Brics, développer des mécanismes de compensation monétaire indépendants du dollar et accélérer les investissements croisés. Cette volonté de bâtir un contrepoids au système financier international dominé par les États-Unis n’est pas nouvelle, mais elle prend une ampleur inédite à l’heure où les tensions commerciales menacent la stabilité de l’économie mondiale.
Au-delà de la rhétorique, les enjeux sont considérables. Le Brésil, comme ses partenaires, dépend encore largement des marchés occidentaux pour ses exportations, notamment dans l’agroalimentaire et le secteur minier. Mais la montée en puissance de la Chine, premier partenaire commercial du Brésil, offre de nouvelles perspectives. Pékin a d’ailleurs immédiatement apporté son soutien à Lula, dénonçant à son tour les « pratiques unilatérales et coercitives » de Washington. L’Inde et l’Afrique du Sud, plus prudentes, ont néanmoins rappelé leur attachement à un commerce international fondé sur des règles équitables.
Cette séquence diplomatique met en lumière la recomposition en cours des rapports de force mondiaux. Les Brics, longtemps perçus comme un club hétéroclite, semblent désormais déterminés à parler d’une seule voix sur les grands dossiers économiques. L’idée d’une monnaie commune, évoquée lors du sommet, progresse lentement mais sûrement. Les discussions sur la création d’une banque de développement indépendante, capable de financer les infrastructures sans passer par les institutions occidentales, avancent également.
Pour Lula, l’enjeu est aussi intérieur. Confronté à des défis économiques majeurs – inflation persistante, ralentissement de la croissance, tensions sociales –, il doit montrer à son opinion publique qu’il défend les intérêts du Brésil sur la scène internationale. Sa posture offensive contre Trump et, plus largement, contre l’hégémonie américaine, lui permet de rallier une partie de la gauche latino-américaine et de renforcer sa stature de leader du Sud global.
Reste à savoir jusqu’où ira cette confrontation. Les États-Unis disposent encore de leviers puissants, qu’il s’agisse de l’accès au marché ou du contrôle des flux financiers internationaux. Mais la détermination des Brics à s’émanciper du carcan occidental est réelle. Les prochaines semaines seront décisives : si Trump met ses menaces à exécution, une guerre commerciale d’ampleur pourrait s’ouvrir, avec des conséquences potentiellement déstabilisatrices pour l’économie mondiale.
Ce bras de fer entre Lula et Trump dépasse le cadre bilatéral. Il symbolise l’affirmation d’un monde multipolaire, où les puissances émergentes revendiquent leur place à la table des négociations. Les Brics, longtemps relégués au second plan, entendent désormais peser sur les règles du jeu. Pour l’Europe et la France, la question est posée : comment s’insérer dans ce nouvel équilibre, alors que les alliances se redessinent et que la compétition pour les ressources et les marchés s’intensifie ?
Dans cette bataille pour l’indépendance, le Brésil et ses partenaires avancent prudemment mais sûrement. La route sera longue, semée d’embûches, mais la dynamique est enclenchée. La sortie de Lula restera, quoi qu’il arrive, comme un marqueur fort de cette nouvelle ère des relations internationales.