Dossier Omondo Société : Macron et les jeunes – Retour sur une relation en demi-teinte entre espoirs, promesses et déceptions.
Emmanuel Macron, un président anti-jeunes ?
Introduction
Depuis son arrivée à l’Élysée en 2017, Emmanuel Macron a constamment placé la jeunesse au cœur de son discours politique. Il s’est présenté comme le président du renouvellement, de la méritocratie et de l’émancipation des jeunes générations, promettant un « nouveau contrat » entre la République et sa jeunesse. Pourtant, après deux mandats, le bilan de cette relation apparaît contrasté, entre espoirs portés par des réformes ambitieuses, promesses de transformation et sentiment de déception, voire de défiance, chez nombre de jeunes Français. Ce dossier analyse, de manière académique et structurée, les politiques menées en faveur de la jeunesse sous Macron, la perception qu’en ont les jeunes eux-mêmes, et la réalité d’un président souvent accusé d’être « anti-jeunes ».
- Les ambitions affichées d’Emmanuel Macron pour la jeunesse
Dès sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron a fait de la jeunesse un axe central de son projet. Il a promis de « libérer les énergies », de lutter contre les inégalités de destin et de donner à chaque jeune « une chance réelle ». Parmi ses mesures phares figuraient la réforme de l’apprentissage, le développement du service civique, la transformation du baccalauréat, l’investissement dans l’enseignement supérieur et la création d’un « Pass Culture » pour favoriser l’accès à la culture.

Le président a également insisté sur la nécessité d’adapter l’école et l’université aux défis du XXIe siècle : transition numérique, mondialisation, écologie, mobilité internationale. Il a affiché l’ambition de faire de la France « une nation start-up », où l’innovation et l’entrepreneuriat seraient à la portée de tous, y compris des plus jeunes.
- Les réformes et dispositifs en faveur des jeunes
Sous les deux mandats Macron, plusieurs réformes majeures ont été engagées :
- L’apprentissage et la formation professionnelle : la réforme de 2018 a simplifié l’accès à l’apprentissage, augmenté les aides aux employeurs et revalorisé l’image de la filière. Le nombre d’apprentis a atteint un record historique, dépassant 900 000 en 2024.
- Le service national universel (SNU) : expérimenté puis généralisé, ce dispositif vise à renforcer la cohésion nationale, l’engagement civique et l’égalité des chances. Il suscite néanmoins des débats sur son caractère obligatoire et son efficacité réelle.
- Le Pass Culture : lancé en 2019, il offre aux jeunes de 18 ans un crédit de 300 € pour accéder à des biens et activités culturels. S’il a rencontré un certain succès, son impact sur la démocratisation culturelle reste discuté.
- Le plan « 1 jeune, 1 solution » : en réponse à la crise du Covid-19, ce plan a mobilisé plus de 9 milliards d’euros pour soutenir l’emploi des jeunes, avec des aides à l’embauche, des formations et des accompagnements personnalisés.
- La réforme du baccalauréat et de Parcoursup : le nouveau bac, plus modulaire et centré sur le contrôle continu, ainsi que la plateforme Parcoursup, ont profondément modifié l’accès à l’enseignement supérieur, suscitant à la fois espoirs et inquiétudes.
III. Les attentes et les déceptions de la jeunesse
Malgré ces réformes, une partie importante de la jeunesse française exprime un sentiment de déception, voire de défiance à l’égard du président. Plusieurs facteurs expliquent ce malaise :
- La précarité persistante : le chômage des jeunes reste supérieur à la moyenne européenne, la précarité de l’emploi (CDD, intérim, stages non rémunérés) touche particulièrement les moins de 30 ans, et la crise du logement étudiant s’aggrave dans les grandes villes.
- La crise du Covid-19 : les confinements, la fermeture des universités et la perte de petits boulots ont durement frappé les étudiants et les jeunes actifs. Beaucoup ont eu le sentiment d’être les « oubliés » de la crise sanitaire.
- Le sentiment d’injustice sociale : la réforme des retraites, la hausse des frais d’inscription pour les étudiants étrangers, les difficultés d’accès à la santé mentale et la montée des inégalités territoriales nourrissent un sentiment d’abandon.
- La défiance politique : les jeunes se disent peu représentés dans les institutions, méfiants envers les partis traditionnels et critiques à l’égard d’un président perçu comme technocrate et éloigné de leurs préoccupations.
- Macron, un président « anti-jeunes » ?
L’accusation d’être « anti-jeunes » revient régulièrement dans les mobilisations étudiantes, les mouvements lycéens ou les réseaux sociaux. Elle s’appuie sur plusieurs épisodes : la réforme du bac et Parcoursup, jugées anxiogènes ; la gestion de la crise sanitaire, perçue comme indifférente aux étudiants ; ou encore les propos du président sur la « fainéantise » ou la « responsabilité » des jeunes.
Pourtant, les enquêtes d’opinion montrent une réalité plus nuancée. Si la défiance est forte, une majorité de jeunes reconnaît l’utilité de certaines mesures (apprentissage, Pass Culture, soutien à l’emploi). Le clivage générationnel recoupe souvent des fractures sociales, territoriales et éducatives.
- Les jeunes dans la vie politique sous Macron
Emmanuel Macron a cherché à renouveler la classe politique, en ouvrant les portes de l’Assemblée nationale à de nombreux jeunes députés lors des élections de 2017 et 2022. Mais la représentation des moins de 30 ans reste faible, tant au Parlement que dans les exécutifs locaux. Les mouvements de jeunesse, les associations et les syndicats étudiants peinent à peser sur les décisions nationales.
La participation électorale des jeunes reste inférieure à la moyenne, même si des mobilisations ponctuelles (climat, égalité, lutte contre le racisme) témoignent d’un engagement civique fort, mais souvent en dehors des cadres institutionnels.
- Analyse : une relation en demi-teinte, entre espoirs et frustrations
Le bilan de la relation entre Emmanuel Macron et la jeunesse est contrasté. Si le président a porté des réformes ambitieuses et innovantes, il n’a pas su répondre à toutes les attentes, ni dissiper le malaise d’une génération confrontée à la précarité, à l’incertitude et à la défiance politique. La promesse d’un « nouveau contrat » entre la République et sa jeunesse reste partiellement accomplie.
L’avenir dépendra de la capacité des pouvoirs publics à renforcer l’inclusion, à lutter contre les inégalités, à soutenir l’engagement et à redonner confiance dans l’avenir. Les jeunes, loin d’être une catégorie homogène, sont porteurs de revendications multiples, mais aussi d’un potentiel d’innovation, de solidarité et de transformation sociale.
Conclusion
Emmanuel Macron restera-t-il dans l’histoire comme un président « anti-jeunes » ? Son bilan, complexe et contrasté, reflète les tensions d’une société en mutation, où la jeunesse est à la fois porteuse d’espoir et de colère. La relation entre le chef de l’État et les jeunes Français demeure un enjeu central pour l’avenir de la démocratie, de la cohésion sociale et du projet républicain.



